Si un jour je me serais douté que je remettrais les pieds ici, à New-York. Certainement la ville la plus attractive du monde, celle où l’on est susceptible le plus de s’amuser et pourtant, pendant l’année où j’y étais venu je ne m’étais pas amusé une seule seconde. J’étais éperdument seul, loin de absolument tout, loin de ma famille, loin de mon amour que j’avais laissé à contrecœur à Los Angeles. Ce fût une année très éprouvante autant physiquement que sentimentalement pour moi, j’ignore encore comment j’ai fait pour tenir avec tout cela mais peut-être que j’étais plus fort que je ne le pensais, sans doute. L’opération avait été très éprouvante, et ma fatigue n’en n’était devenue que plus extrême, personne ne venait me voir puisque au final, je n’avais prévenu personne, et le pire, c’est que je ne pouvais m’en prendre qu’à moi-même puisqu’il s’agissait de mes propres choix, et je ne faisais qu’en récolter les conséquences. Il m’arrivait de me poser quelques questions à ce sujet d’ailleurs, et si l’opération avait mal tourné et que je n’avais pas survécu, alors le mal que je ferais autour de moi serait bien plus grand que si j’avais dit la vérité dès le début. Et si tout le monde me tournait le dos suite à cela, si on me détestait d’avoir caché un tel secret, et enfin, si on m’avait oublié ? Oui je sais, c’est extrême, néanmoins j’y avais songé, surtout en pensant à October. J’avais une peur bleue que la jeune femme m’oublie. Qu’elle refasse sa vie, décide de prendre un nouveau départ, avec quelqu’un d’autre peut-être. Rien ne m’aurait fait plus de mal, à vrai-dire, je crois que si avait été le cas, j’aurais mal tourné, très mal tourné. Mais au final, qu’aurais-je pu dire à cela ? Je l’avais lâchement abandonnée, sans lui donner la moindre explication, elle aurait pu croire absolument tout, elle aurait été en droit de vouloir tirer une croix sur moi. Même si les raisons de mon départ précipité étaient justifiées sur le moment, aujourd’hui, je regrette un peu d’avoir agis de la sorte. Même si je sais que j’ai fait ça pour la protéger, pour ne pas qu’elle s’inquiète, en sachant qu’à ce moment-là, October n’était pas au mieux de sa forme, je ne voulais surtout pas en rajouter une couche, tout simplement.

Alors j’avais plié bagages afin d’aller à la rencontre d’un célèbre chirurgien neurologique de New-York. Et comme on n’opère pas un cerveau comme ça, il avait fallu une longue préparation, tant psychologique que physique. Il est clair que ce n’était pas une année sabbatique loin de là. Mélangez ça à la ville qu’est NY, et vous ne dormez jamais. Oh oui,  cette ville est complètement déjantée, vous y rencontrerez des personnes en tout genre, toutes à la recherche d’une manière de se démarquer des autres, d’être différentes, et c’était assez plaisant, même si la tranquillité de Los Angeles me convenait davantage. J’avais vécu tellement de choses à Los Angeles, j’y avais grandi, j’avais obtenu mes diplômes, et fait énormément de rencontre là-haut, mais par dessus tout, j’y avais rencontré l’amour. Quitter la ville des anges n’avait pas été facile, même si je savais que j’y retournerai, c’était un peu comme si je m’arrachais volontairement à ma vie, et c’était très frustrant.

Après l’opération, le manque s’est définitivement installé. Je n’avais qu’une idée en tête, retourner là où tout avait commencé, la revoir, la reconquérir, lui expliquer tout absolument tout. Chose plus facile à dire qu’à faire, néanmoins je savais qu’il fallait que je le fasse, pour mon bien, et pour le sien également. Elle était en droit de savoir, elle partageait ma vie depuis bien des années maintenant, elle était la personne qui me connaissait certainement le mieux sur cette terre, et à partir de ça, c’était la moindre des choses que je pouvais faire. Alors j’avais pris mon courage à deux mains, et avais plié bagage à nouveau, direction Los Angeles.

La revoir m’avait rempli de bonheur, mon cœur s’était mis à battre très vite, comme lorsque je l’avais vue pour la première fois à UCLA. Elle était merveilleuse, encore plus belle qu’avant, et c’est à ce moment-là que je me suis rendu compte qu’elle était, et restera à jamais la femme de ma vie. J’avais tout oublié en un fragment de seconde, mon opération, tout ces mauvais souvenirs, tout avait disparu, par sa simple présence, son simple regard. Nos retrouvailles avaient été très émouvantes, très belles. Néanmoins, elle m’en voulait. Ce que je comprenais parfaitement. Elle s’était tant inquiétée pour moi, elle s’était posée tellement de questions à propos de mon départ ; Et puis vint le moment où il a fallu jouer franc jeux, parler de nos sentiments, de ce qui s’était passé pendant toute cette année loin l’un de l’autre, et ça n’avait pas été une partie de plaisir je vous l’assure. Entendre dire October qu’elle avait eu des aventures m’avait déchiré le cœur, même s’il ne s’agissait à priori que d’histoires sans lendemain, même si ça ne comptait pas pour elle, même si tout ça était dans l’optique d’aller mieux, je n’arrivais pas à supporter cela : Mais pouvais-je réellement lui en vouloir ? La réponse était non. Non puisque j’aurais fait la même chose, je suppose. Mais l’imaginer dans les bras d’un autre homme me glaçait le sang, comme si j’avais été oublié, effacé, rayé de la circulation, et ça, ça faisait extrêmement mal.
Nous étions conscients que nous étions amoureux l’un de l’autre, et quand on aime, on répare, on ne jette pas. Alors nous avons essayé de recoller les morceaux elle et moi. J’étais incapable de la laisser tranquille, suite à tout cela, je me montrais énormément possessif avec elle, de peur qu’elle m’échappe, de peur qu’elle ne veuille plus de moi. C’était horrible de vivre dans le doute permanent, j’avais conscience que la jalousie excessive ne ferait pas de bien à notre couple, mais c’était plus fort que moi. Je connais October, et je sais que si elle voulait partir, elle serait sincère avec moi et me le dirait très clairement, mais le ferait-elle encore avec ce que je lui ai fait enduré ? J’en doute alors je me protège au mieux. Et puis nous avons repris nos vies là où nous les avions laissées, elle, brillante psychologue, moi et mon cabinet d’avocat. Tentant tant bien que mal de s’accrocher à ce couple qui nous chérissions tant depuis des années déjà.

Changer d’air, voilà ce que nous avions besoin tout les deux. J’en avais l’intime conviction. October avait besoin de comprendre où j’avais vécu durant un an complet loin d’elle, ce que j’avais fait, les gens que j’avais rencontrés. Il s’agissait de quelque chose d’important pour elle, et pour moi aussi, il s’agissait-là de repartir sur de vraies bonnes bases, de surmonter nos difficultés et finalement : D’aller de l’avant. Allé simple pour New-York. Ça n’était pas forcément facile pour moi d’y remettre les pieds, mais elle était avec moi et à partir de là tout pouvait aller beaucoup mieux. Je voulais lui montrer qu’elle vie j’avais mené durant un an sans elle, sans rien, je voulais qu’elle sache que ça n’avait pas été une réelle partie de plaisir, au contraire. Non pas que je voulais gâcher l’ambiance, mais puisqu’un couple est basé sur le partage et la confiance, je voulais partager cela avec elle.

La ville n’avait pas changé, elle était restée la même. Toujours aussi bruyante, toujours aussi vivante, toujours aussi peuplée de personnes différentes les unes des autres. Connaissant un peu mieux les lieux désormais, je décidais d’emmener October dans un bar assez sympathique où j’allais souvent lorsque j’avais le cafard. J’avais sympathisé avec quelques habitués, je m’y sentais bien. Le décor était assez moderne, on y jouait de la bonne musique en acoustique la plupart du temps, et puis les gens étaient toujours élégants, il s’agissait d’un bar assez classe.
« Allez viens je t’emmène boire un verre, le voyage m’a assoiffé. » Je souriais à October avant de lui prendre la main sans trop lui laisser le choix, j’étais heureux d’être ici avec elle. Je n’avais besoin de rien d’autre.
Le mec de l’entrée me reconnu assez rapidement et m’afficha un très large sourire. « Hey tu es de retour, et bien accompagné ! » Dit-il les yeux rivés sur ma jolie compagne. Que voulez-vous ? C’est vrai qu’elle est magnifique. Je le souris avant de lui serrer la main amicalement en acquiesçant son dernier commentaire. Il est vrai que cet homme m’avait vu plus d’une fois rentrer dans ce bar, et tout le temps seul avec mauvaise mine alors me voir accompagné et tout sourire devait le rassurer quelque peu.
Nous voilà dans le bar, lui non plus n’avait pas changé. Je me retournais pour jeter un coup d’œil à October, ayant du mal à croire qu’elle était bel et bien là, à mes côtés, j’étais comblé. La jeune femme s’éloigna pour rejoindre les toilettes tandis que je m’avançais vers le bar. J’y vu Lila, la barmaid, elle écarquilla grand les yeux en me voyant, ce qui me fit sourire. Lila était une très belle brune, pétillante et par dessus tout très gentille. Je l’avais rencontrée également ici, la plupart du temps je me mettais assis au bar seul alors la jeune femme avait finit par me parler, elle avait vu que je n’allais pas très bien, alors elle avait fait en sorte de me remonter le moral. Et ça avait marché. J’avais beaucoup discuté avec elle, de ma vie, de tout. Oh bien-sûr m’a discrétion avait fait que je ne lui avais pas raconté ce pourquoi j’étais resté à New-York un an, j’avais simplement dit que c’était pour le travail.
Lila contourna le comptoir pour me sauter dans les bras gaiement. « JAYDEN ! » Je l’enlaçai à mon tour, heureux de la revoir. « Mais tu aurais pu prévenir que tu revenais, je me suis inquiétée de ne plus te voir rôder par ici ! On ne quitte pas New-York, ou plutôt on ne quitte pas Lila comme ça Monsieur ! » Je ris à cette réflexion, cette fille déborde d’énergie, et j’adore ça. « Je sais, je suis parti très vite, j’ai prévenu personne tu sais. » Je me détachai un peu d’elle, afin de trouver son regard. Elle fit de même avant de me pincer la joue comme à un enfant. « Mais moi je ne suis pas n’importe qui très cher ! ». Je souris d’avantage à ces derniers mots. Elle revint alors derrière son comptoir. « Alors qu’est-ce que je te sers beau gosse ? » Je m’assis sur l’un des grands tabourets qui longeait le bar. « Je vais attendre pour commander Lila, je ne suis pas seul. » Son visage se transforma littéralement, comme si elle était déçue, comme si l’instant précédent où elle respirait le bonheur n’avait jamais existé. Je tournais la tête en direction du couloir menant aux toilettes et je vis October revenir, je souris presque automatiquement, bon sang ce que je l’aimais.